mardi 6 novembre 2018

#ChallengeAZ 2018 - Lettre E écrite à un Evadé, Jacques REGULIER

Nous voici au cinquième jour du #ChallengeAZ 2018. A ce propos, je vous conseille vivement de lire l'ensemble des contributions des participants car elles sont toutes de qualité ! Cette année, je vous propose une lettre, écrite à l'un de mes aïeux ou collatéraux. Des lettres pour interroger, pour rendre hommage, ou tout simplement pour dire ô combien certains de mes aïeux me manquent... 

La lettre d'aujourd'hui est destinée au père de Jacques REGULIER, époux de Catherine VALENTIN (sosa 481). Prénommé également Jacques, il est originaire de Cossé-le-Vivien (Mayenne) et a vécu une grande partie de sa vie dans la baronnie de Craon. Il est très probable que Jacques REGULIER (fils) est le père de mon aïeul, Louis-Joseph WALENTIN (sosa 240)...

Dans cette lettre, j'ai souhaité interroger Jacques REGULIER-père sur un sombre épisode de sa vie, puisqu'il a été emprisonné à la prison de Craon en 1767 avant de s'en échapper quelques semaines plus tard...



***

Mardi 6 novembre 2018


Sieur Régulier, Jacques,


Je me nomme Sébastien et je suis un lointain descendant de Catherine VALENTIN qui avait épousé en 1791 votre fils, Jacques. Ma lettre vous surprendra sans doute car n'avons a priori aucun lien familial (ceci reste néanmoins à démontrer car il semblerait que votre fils soit le père de mon ancêtre, mais ceci est une autre histoire!).

Ma curiosité m'a poussé à rechercher des informations sur votre famille et quelle ne fut pas ma surprise de retrouver des traces d'une évasion d'un certain Jacques REGULIER à Craon ? J'ai rapidement fait le lien avec vous....  Les faits sont là, vous ne pouvez pas le cacher !

Donc cette histoire m'a intéressé et, disons-le, amusé, car, avouez-le, le récit de votre évasion est assez rocambolesque !

Tout commence le 18 septembre 1767. Suite à la requête du procureur fiscal de Craon, Jean GUION, sergent, et Jacques QUENFOIN, huissier de police, sont venus à votre demeure située au village de la Gaullerie, en la paroisse d'Athée pour vous arrêter et vous conduire la prison de Craon. J'avoue ne pas avoir trouvé les motifs de votre arrestation. On parle de divers crimes...

La prison de Craon était à cette époque située dans une tour près de la porte St-Pierre comme localisé sur le plan ci-dessous. J'espère ne pas me tromper.


Plan extrait de Bodard de la Jacopière, 1872. Chroniques Craonnaises. Deuxième édition. Le Mans.  750p


Quoi qu'il en soit, vous êtes bien décidé à ne pas rester cloitré dans votre cellule.

Savez-vous que l'ensemble des archives judiciaires sont désormais librement accessibles ? Et oui Jacques, votre évasion n'a aujourd'hui plus de secrets pour quiconque ! J'ai ainsi pu lire les procès-verbaux constatant votre "exploit" et à leur lecture, j'avoue avoir suivi cette histoire comme un roman !

Ainsi, après plusieurs semaines de détention, vous aviez la ferme intention de vous échapper. Sans doute avec l'aide de votre femme avec qui vous échangiez régulièrement par la fenêtre de votre cachot, vous avez monté un plan de fuite (certaines mauvaises langues diront qu'elle proférait des insultes aux passants qui tentaient d'écouter vos conversations... !).

Puis, le soir du 21 octobre, tout est prêt. Cette date n'a pas été choisie par hasard, car il s'agissait d'une nuit de nouvelle lune : des conditions optimales pour ne pas être vu !

Le soir avance. Vous attendez que la famille de votre geôlier s'endorme. Sans bruit, grâce à un outil de fortune, vous arrivez à vous défaire de vos menottes et des boucles qui vous tenez les pieds. Doucement, vous posez le tout sur le bord de la fenêtre de votre cachot.

Une fois les mains libres, vous vous approchez du trou des latrines qui communique avec la rue. Consciencieusement (mais rapidement), une par une, vous sortez les pierres que vous aviez pris le temps de desceller les jours et semaines précédentes. Le trou s'agrandit. Vous pouvez passer.

La suite de votre évasion est digne des meilleurs romans. Nous nouez plusieurs draps pour former une corde de fortune assez solide et assez longue pour descendre en bas, dans la rue. Il est deux heures du matin.

En contrebas, une personne est là, avec une monture. Dans cette nuit sombre, nul n'aurait pu deviner qui vous attendez. Une fois descendu, vous montez rapidement à cheval et vous partez au galop en passant pas la porte de Château-Gontier. Seule une personne vous reconnaîtra.

Jacques, qui vous attendez ce soir là ? Étais-ce votre épouse ? Votre fils ?

Si vous me le permettez, j'ai encore une dernière interrogation. J'ai perdu toute trace de vous après votre évasion de la prison de Craon. Je ne sais pas si vous avez été retrouvé, emprisonné, exécuté ou si vous avez vécu le reste de votre vie en cavale... Enfin si, je n'ai qu'un seul indice et ne sais trop comment l'interpréter. Lors du second mariage de votre plus jeune fils, Jacques (décidément, vous manquiez d'imagination) avec Madeleine PERAULT en 1823 à Angers, vous êtes cités comme "décédé dans les isles sans savoir l’époque de son décès ". S'agissait-il de la condamnation donnée suite à votre capture ?

Jacques, malgré vos condamnations et divers crimes, j'ai une affection particulière pour votre histoire... Sans doute est-ce lié au temps qui est passé et qui a effacé toute trace de vos méfaits.

En tout cas, veuillez recevoir, Sieur REGULIER, Jacques, les salutations d'un possible descendant.



Sébastien

6 commentaires:

  1. Incroyable cette histoire ! Quel plaisir de tomber sur des ancêtres qui ont eu une vie aussi rocambolesque !

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    1. Merci Christelle pour vos lectures et commentaires réguliers ! Je suis heureux que mes lettres vous plaisent :)

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  2. Bonjour,

    Cette histoire est très intéressante. Dommage que la suite du périple ne soit pas (encore ?) connue ! Bonne continuation ^^

    Matthieu.

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    1. Bonjour Matthieu et merci pour votre commentaire. J'ai cherché dans toutes les sources possibles aux archives de la Mayenne, et malheureusement, plus aucune trace. Attendons un peu... peut-être qu'avec un peu de sérendipité...

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  3. C'est un vrai régal de vous lire ! J'espère que vous trouverez ce qui est arrivé à votre (possible) ancêtre.

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